Le matin à Vieille Nouvelle

[Sandwood]

J'aime cette sensation le matin en arrivant sur la plage de Port La Nouvelle. Avec ce décors désertique, un peu lunaire. Cette sensation d'être dans un endroit secret, sans le poids de la routine qui pèse sur moi. Avec la certitude qu'une belle journée se prépare.
Je ferme les yeux pour faire abstraction de ma peur, de l'angoisse qui pourrait m'envahir en repensant au tragique évenement survenu cet été. Je sais alors que si la vie a une fin, c'est pour nous pousser à profiter de notre passage sur Terre.
Les éléments autour de moi, l'eau bleue lisse comme un miroir, le vent qui berce et dorlotte mon corps, le sable encore frais sous mes pieds nus - tous ces éléments me rappellent aussi que rien ne m'appartient, qu'une force qui me dépasse nous offre notre terrain de jeu.
Le petit mot aux collègues, nous savons sans le dire que nous sommes contents d'être ensemble. Les mêmes gestes, mille fois répétés depuis sept ans maintenant. D'abord les lignes, puis l'aile. Enfin la combinaison, le gilet - le casque. Un signe du pouce, voici l'aile qui vole dans le ciel. Le premier contact avec l'eau, toujours un peu fraîche. Un premier bord; j'admire la pureté de la gerbe d'eau qui me suit. Une prise de carre, un virage. Encore quelques mètres. J'envoie franchement l'aile. Je m'arrache littéralement à la gravité. Plus un bruit d'eau. Je suis un kitesurfeur.




PS : vous l'aurez compris ce message essaie de retranscrire mes sensations, d'aller plus loin que les habituelles discussions sur les spots, le matos, les moves. Depuis 7 ans le kitesurf à réellement guidé certains de mes choix de vie, je ne peux pas le borner à un simple loisir ou sport, c'est beaucoup plus que ça. Je vous invite vous aussi à continer ce sujet en parlant de vos propres sensations, ressenti, angoisse, liés plus ou moins directement au kite.

[RideZeBigOne]

Aller Fab, moins poétique que ton message mais je pense que chacun se retrouvera dans au moins un des passages de mon petit récit.

NB : toutes ressemblances avec des personnes ayant existées ne seraient que pure coîncidences

6h du mat'... le réveil sonne, en essayant de ne pas réveiller ma moitié, je sors du lit en pensant déjà au bruit du vent dans les lignes.
Après un coup d’œil rapide aux dernières prev' qui donnent un petit 15kt de NO, je pars rejoindre les potes au point de rendez-vous habituel, la journée s'annonce bien!
Y'en a encore un qui ne s'est pas réveillé, sûrement la soirée qui a été arrosée, ce n'est pas grave de tout façon on est plus que prévu, le buzz de la liste a du succès.
Les voitures chargées à bloc le convoi à peine réveillé se dirige vers leur spot favori. A mi-chemin, le toulousain mal réveillé qui a eu des regrets d'avoir loupé le départ, nous appelle pour nous dire que ça rentre plus fort que prévu (45kt dans les molles), les boules on va devoir se rabattre sur un spot de repli. Déjà nos espoirs de nouveaux tricks et vent régulier s'envolent .
C'est décidé, on se rabat sur le spot de molda.

On arrive enfin après un surplus de route avec la voiture qui roule sur deux roues tellement le vent de coté est fort. A peine sortis des voitures, on prend enfin un bol d'air frais avec un soupçon d'odeur de vase qu'on avait oublié depuis la dernière fois.
Force est constaté que le vent n'est pas encore établi, y'a comme un mouvement d'angoisse dans le groupe... Les 'anciens' rassurent tout le monde, ça va rentrer dans 12minutes, faut qu'on gréer nos 7m² et moins.

On fini par s'activer car le vent semble rentrer, le temps de m'apercevoir que j'ai oublié mes chaussons le vent est déjà établi. Pendant que j'enfile mon shorty, je vois les autres déjà partir en intégrale malgré la saison estivale... sûrement des frileux!
Avec le matos sur le dos, je me rappelle pourquoi il fallait les chaussons pour naviguer ici : il faut franchir un ruisseau de vase odorante pour atteindre le spot. Tant pis ce n'est que de la vase, il parait que c'est bon pour la peau.

Je suis déjà en train de dérouler mes lignes entre celles déjà posées sur le sable et j'ai comme un éclair qui traverse ma tête : j'ai oublié de prévenir ma moitié que j'étais bien arrivé. Zut, pas envie de retraverser la vase, en plus les autres sont déjà en train de partir à l'eau.
Je gonfle comme un shaddock fou ma voile quand on vient me taper sur l'épaule : "tu me décolles steuplé ?" ... je suis avant dernier, je vais être bon pour décoller tout seul.
A peine énervé après avoir décollé trois fois la voile du local pour affiner ses réglages, je retourne à mon quiver. Au loin, je vois d'autres riders se garer sur le parking, ils vont pouvoir me décoller!
Encore un quart d'heure de perdu à attendre que les riders arrivent, j'agresse le mec en tête de cortège pour qu'il me décolle. Aggripé à ma barre, je fais signe pour qu'il retourne ma voile et là c'est la cata. Le vent a emmêlé mes lignes dans les plantes sèches qui poussent là...
C'est bien ma veine, me voilà en train de m'acharner sur les broussailles pour démêler les lignes. Me voyant galérer, le caddie que j'avais trouvé décide d'aller gréer son matos.
Finalement mes lignes sont propres mais mon caddie a gréé sa voile sur les lignes et me demande avec un grand sourire si je peux le décoller à son tour. Zeeennnnn...

C'est bon, je suis à l'eau, le caddie que j'ai finalement trouvé a failli me décoller pleine fenêtre mais on y est arrivé.

Enfin, le doux sifflement des lignes dans le vent... c'est bien monté depuis tout à l'heure j'espère que ça va se calmer. Je vais rejoindre les potes déjà bien chaud et qui satellisent dans tous les sens. Un petit signe, un sourire, l'ambiance est bonne, il fait beau... d'ailleurs j'aurai du mettre de la crème solaire car le soleil cogne fort aujourd'hui, fallait être fou pour mettre son intégrale.

Aller, je ne suis pas très chaud mais j'ai trop envie : j'envoie un gros jump. Wouha, super sensation, je monte je monte, je peux voir plus loin, plus un bruit, je contemple le spot de plus haut. D'ailleurs, je constate que j'avais surestimé la profondeur de l'eau, on voit bien le fond. J'estime mon point de posé, ça va on dirait que c'est plus sombre... merde c'est carrément noir en fait, sûrement un coin de vase, faut absolument que je pose sinon je me transforme en bouse humaine.

Je ne sais pas ce qu'il s'est passé, un trou d'air, un mauvais renvoi, peut être ai-je trop choqué la voile... je suis en train de m'écraser dans cette mare de flotte noir d’ algues en décomposition, j'ai un haut le cœur tellement l'odeur est forte, je sens des picotements dans les jambes... les algues urticantes se régalent de mes jambes nues déjà brûlées par le soleil. Je comprends pourquoi les potes sont en intégrale. J'ai réussi à ne pas faire tomber mon aile, je récupère ma board rapidement et me dirige vers un coin d'eau claire pour me nettoyer. Je me jette dans les 50cm d'eau claire sans voir les méduses qui batifolent gaiement, par chance ces méduses ne sont pas venimeuses.

C'est ma journée... calmé par ce début de session, je navigue tranquillement. De toute façon mes jambes me grattent trop, mes bras sont cramés, j'ai un trop fort goût de vase dans la bouche et je pense déjà aux 15 messages laissés par ma moitié sur ma boite vocale.

Je suis un kitesurfeur toulousain



Qui se lance dans un récit avec varirantes :
- Marin annonce et finalement pétole
- session à la ganguise (CédricG, je crois que tu as une session mémorable là-ba avec des allemands qui te pretent un vélo pour rejoindre Benoit de l'autre coté de la berge...)


A+

Rzbo

[twins_kite]

Ben dit donc c'est beau tout ça

Je me lance :

Pt'ain fait chier j'ai pas navigué depuis trop longtemps !


A +

[misspikdum]

il est a noter que je ne laisse jamais 15 messages
sur ton portable
misspikdum

[KiteBird]

La peur au ventre Je m'en souviens comme si c'était hier.

Ca y est, j'arrive à la Palme, le spot de kite de la région, il est déjà rempli, 10 personnes ! Décidément ce spot devient à la mode. Et c'est que ca doit être navigable. Je suis partagé entre le soulagement de ne pas avoir fait le trajet pour rien, et l'appréhension de devoir me jeter à l'eau.

A voir les quelques kites sur l'eau, c'est hyper irrégulier, comme d'hab. Je vois les autres se prendre de belles gamelles, quelques uns sont déjà sur la plage en train de déméler leurs lignes, suite à un largage de survie.
Le tableau est familier...

Le vent frappe ma voiture, j'ai l'impression d'avoir affaire à un poltergeist.
Allez j'ouvre la portière, premier effort en la retenant, premiere lutte contre le vent !

Mais qu'est ce que je fais là ?!! Peut etre 1h40 de route pour finir à l'hosto ?

C'est ma 5e session, et je me demande quelle galère je vais encore vivre. J'ai encore en tete mon meilleur pote qui s'est éclaté contre une caisse faute de n'avoir pu larguer, il s'en sort avec une grosse cicatrice et une allergie au kite, et moi je sais que je me dois de ne pas suivre son exemple. Je pourrais pas dire que j'aurais pas été averti !
Je repense à ma dernière session à la ganguise; un sprint au décollage, aile pleine fenetre, qui s'est terminé par un placage radical juste au bord de l'eau. à 1m pres je serai platré de partout à cet instant; peut etre pas un mal, car ca pourrait etre pire aujourd'hui...

Mais l'envie de kiter est là, elle prends le dessus sur mes peurs, elle va au delà de mon raisonnement rationnel. Je regarde les guerriers qui arrivent à tirer des bords, je sais le sentiment de pleinitude qui ce cache derriere leur sourire. Je veux revivre ça !!!!!
Et j'espere que je pourrais en faire plus d'une 1/2h, un peu marre de passer des heures à démeler mes lignes apres largage, décidément ce sport apprends à rester zen.

Je grée ma 7m, comment on met les lignes déjà ? Surtout pas se planter, tu n'es pas pressé, les accidents sur inversion sont monnaie courante.
Voilà, je suis pret à partir. Un peu de physionomie, essayer de repérer un gars un peu expérimenté parmis tous ces débutants pour m'aider à décoller. "On peut faire 100m dans l'eau ?" le gars sourie et optempere naturellement.

Ca y est je suis bien positionné, non attends, je regle les avants ! L'aile tire bien fort en bord de fenetre, mais je sais que je ne peux avoir mieux, faut se lancer, je crie un gros "OK" sans oser quitter les mains de la barre.
L'aile est lachée, je suis seul avec elle et le vent. En l'air, le duel avec le vent commence, l'aile est instable, le vent tourne, des claques, des molles, j'arrive péniblement à reculer de 50m.

Allez le waterstart, incroyable, je pars au planning sans me vautrer, une session qui commence bien !!! Je fini par exploser 200m plus loin en tentant une transition, mais quel pieds !!! J'en veux encore !! J'ai le sentiment que je vais vivre de grands moments grace à ce sport!!

Wipikashoot
novembre 2001

[KiteBird]

:evil: il est a noter que je ne laisse jamais 15 messages
sur ton portable
misspikdum

Ah enfin le premier message de miss pikdum sur le site, bien joué julien

[babs17]

Bonjour à tous,

terrible mais tellement vrai vos récits de session!!! A mon tour si vous le permettez :

Marre de cette région ou il m'a fallu m'expatrier pour suivre ma chérie. Chez moi, y avait du vent presque tous les jours à La Rochelle. Un mois que j ai pas ridé...et trois mois que j 'ai pas sorti autre chose que ma boxer sle 12!!!

Et dire que dans le sud est, ils se gavent les veinards!!!
Vendredi 05 octobre, j'en peux plus, j'ai une humeur de chien. J'en ai marre du boulot, de ma nana qui ne comprend pas pourquoi je suis en manque de kite... Vite, j'appelle les potes et je les convaincs de faire 8 heures d'autoroute A/R direction Leucate.
Samedi matin 7h. Il fait froid dehors, je charge mes affaires dans le break, fait le plein, la pression des pneus. Je suis à cran (les 4 tasses de café ou l'attente de la session?)
7h30 : ils appellent : "on est à la bourre, on est la dans 5 minutes!!"
7h45 : ils arrivent, je charge direct leur matos dans le coffre. 3 riders, 7 voiles, 4 boards et 3 sacs... tout rentre, on part!!
10h00 : on arrive à Toulouse. Si seulement je pouvais y habiter, ca serait top!!!
12h15 : arrivée à l'etang de la Palme. J ai oublié les chaussons. Pas grave, ca s'ajoutera aux 25 points de suture sous le pied de l'année derniere!!
En bon "aquitain de base", je commence a gonfler ma 12. Erreur!!! ici, vous ne sortez pas les grosses baches!!
Retour à la voiture, je transpire deja dans ma combi d'hiver!!! et je regarde l'heure : 12h30. Deja 6 heures que je suis levé et toujours pas à l'eau!!!
Je grée la 9, demande au retardaire du groupe de me décoller.
E N F I N !!!! Ca fait tellement longtemps que je ne me souvenais plus de la couleur de ma 9m². Le vent est irrégulier (pour moi) toute la journée mais quelle session!!

[JMi]

" La peur au ventre " ... "Mais l'envie de kiter est là, elle prends le dessus sur mes peurs"
c'est drole ca faisait ca à pleins d'autres alors...
ca s'appelle la "passion" qd ca fait ca ,non? Sinon pourquoi aller vers qqchose qui nous stresse autant...
Qd meme j'ai gardé cette sensation longtemps...QUAND J'ALLAIS A LA GANGUISE!!!!!
Et apres vous serez d'accord que c'est l'inverse apres3 ou 4 ans de nav tu y vas tellement les yeux fermés, sûr de toi, relax , PRESSE d'aller à l'eau que tu as tendance à minimiser les risques..
JMi

[Sandwood]

Mardi 30 Juillet 2008. Je suis complètement à l'Ouest. C'est peu dire. 8h du matin, la pluie fine et cinglante ne tombe plus, elle vole tel un karcher géant. J'ouvre la tente battue par 30 kt de vent. Le ciel ne tombera pas plus bas. Je me jette dans la voiture, allume i102-104, il fait 14°c. Sur ce spot de Silverstrand du coté de Louisbourg, là bas , au Connemara.

Nonobstant la pluie, les conditions sont parfaites. Vent de sud side, oscillant entre 25 et 30kt, spot de sable blanc, quelques petites vagues et la marée monte. Une immense zone herbeuse derrière la plage, parfaitement tondue par les nombreux moutons qui ont du se planquer du coté du diable vauvert.

Je pense à cette phrase pseudo-philosophique d'Alain Robert, le spiderman français qui monte les tours de 300m en solo intégral, c'est à dire sans aucune sécurité. "There is nothing magic, it's just a question of physical power and mental power". Ce matin, je suis comme Alain, sans filet. Il n'y a absolument personne, pas même un pêcheur. C'est dire. La pluie cesse.
Je grée l'hydra 9 sur l'herbe, prends une photo de la voile.
Décollage autonome facile. Le vent est bon, il porte bien. Je ne m'éloigne pas trop, pas plus que ce que je m'estime capable de nager en cas de pépin. 500m. De toute façon, les vagues au bord m'incite à préferer le surf au freestyle au large. L'eau est plus que rafraichissante, 14°c sans doute. Un grain passe. Je suis déjà mouillé, ça ne me gène pas.

Vers 10h30, le ciel se dégage, les vagues grossissent avec la marée montante, le soleil brille désormais sur le Craught Patrick au loin. Une colo arrive pour un cour de surf. De quoi se sentir en sécurité. Les conditions sont parfaites, je suis seul sur un spot magnifique et immense, le 30 Juillet. Le même sentiment d'invulnérabilité gonfle mes veines que lors d'une randonnée incroyable de huit heures sans croiser personne en Norvège en Juin 2007. Go Far, go North !

[Sandwood]

Adrénaline

C'est un très joli nom. Cela pourrait presque être le prénom d'une charmante jeune femme. Tout comme elle, Adrénaline est la source de passion aux effets dévastateurs. Car si parfois je lui préfère le charme d'une autre demoiselle, jamais je ne saurai m'éloigner d'Adrénaline. Je te suis prisonnier, au point d'avoir préférer à la vie conjugale les chemins de la liberté. Pour te trouver, je dois m'échapper de Toulouse, fuir, fuir vers la mer, lever mon aile dans une tramontane complice, et m'envoler. Alors tu me berces, alors tu m'apportes la félicité, ce moment de grâce, ma drogue.
Te rends-tu compte hélas des sacrifices qu'il faut que je concède pour que nous puissions partager ces moments ?

[KiteBird]

"
"J'ai quitté les lierres tristes et maussades de la terre et suis allé danser sur les ailes souriantes du ciel. J'ai grimpé toujours plus haut vers le soleil en trouant les nuages tout poudrés de soleil. J'ai fait plus de cent choses au delà de vos rêves, j'ai virevolté, volé et piqué en flèche dans l'infini. Et, alors que je parcourais l'esprit exalté les routes vierges de l'espace, mon bras étendu, j'ai touché le visage de Dieu. "
"

Shakespear

[Sandwood]

La belle journée d'été se profile pour le lendemain. Le bulletin cote prévoit le traditionnel NE F3-4, tournant SE fraichissant F5, localement F6 au sud de Leucate, temporairement F7 parage béar. Je le connais par coeur ce bulletin, il m'a eu l'année derniere, celle d'avant aussi. Mais cette fois-ci, je me dis que c'est la bonne. De toute façon il fait 35° à Toulouse, alors autant aller chercher la fraicheur.
Je pars vers 10h30, confiant. Après 2h de route, je suis à Leucate. Pas un souffle, mais pas d'inquiètude, c'est écrit dans les shops - thermique à st Cyp. Je descends tranquillement.
Sur place, 8kt de NE. Premières inquiétudes. Il faudrait que ça tourne.
15h. Toujours les 8kt de NE. Cela commence à sentir le roussi. La plage explose de bidochons, de ch'tis, de mômes "hyperactifs" et de parents inaptes à les éduquer. Et ils ont tous la banane - "ah, enfin il y a pas de vent, c'est pas comme les 3 jours précédents où on pouvait pas bronzer tellement ça soufflait, on prenait plein de sable ! ".
Je me cale derrière le volant de l'Opel, je mets la radio fleix-fm. La dance espagnole, ça va peut être me détendre.
16h. Quelques nuages arrivent du SE. Je crois voir une barre au loin. Peut être annonciatrice de vent ! 17h. Ma barre a amener de la grisaille. La température a chuté, le peu de vent avec. Il n'y a plus rien du tout, la mer est laiteuse. Les F6 annoncés, ils sont dans mon cerveau -là ça bouillone, c'est la tempête.
18h. Je tourne la clé dans le néman, pousse un soupir, place une K7 de Scorpion dans le lecteur..."still loving you..." - Après tout, tout va bien !

[Sandwood]

La clé du destin

Encore un jour à regarder le vent d’antan souffler derrière mon écran, scotché au boulot, à Toulouse. Les relevés baston sont formels : 25 kt parfait à Saint Cyp. Un petit tour sur le blog de Filaip finit de m’enfiler le moral dans les chaussettes. – « Le vent s’est levé à St Cyp – plus d’info ce soir ».
Malgré tous mes efforts, malgré la technique de je ferme les yeux et repense 3min à ma plus belle session, je n’y arrive pas. Efficacité proche de zéro. Mon employeur ferait mieux de m’accorder une RTT thérapeutique. Je veux faire boulanger, facteur ou encore mieux veilleur de nuit à Leucate !
Parfois je déteste le kite. Je me prends à imaginer comment serait ma vie s’il n’y avait pas eu ce petit epsilon, cet imprévu. Je serais sans doute un gentil beauf qui irait à la mer en été, quand il n’y a pas de vent, avec une gentille beaufette – et je serais heureux dans mon ignorance. Les jours de vent, je râlerais un peu contre le sable qui vole, et contre ces kékés qui viennent jumper à coté de la zone de baignade. Faut faire gaffe il parait que les câbles tronçonnent une tête comme une guillotine, et surtout cet abruti qui a foutu son short sur sa combinaison a pas l’air de bien maîtriser son palonnier, parfois il perd sa planche pendant son vol si bien qu’il est obligé de l’attraper à la main...et cet autre là bas essaie une figure qui ressemble à un jambon de Bayonne pendu dans le cellier de ma grand-mère.
Au lieu de ça un delta de destin m’a transformé de lambda moyen en kitesurfeur oméga. Je ne suis pas sûr d’identifier l’élément déclencheur – le besoin d’adrénaline, l’amour de la mer ? – D’ailleurs, le kite est-il réellement la finalité ou bien un simple vecteur ? A savoir, si Manu Bertin n’avait pas existé, serais-je sur mon canapé bidonnant devant la F1 ou plutôt sous un parapente, sur une planche, ou fou de roller ? Je n’ose m’imaginer dans la première situation, même si parfois, comme aujourd’hui, j’apprécierais tant son confort !